Expo Alfred « Viaggio italiano »


Alors que l’été indien semble définitivement terminé, venez retrouver un peu de chaleur et de soleil à la galerie Momie où se tient jusqu’au 28 octobre l’exposition consacrée à Alfred. Un célèbre « régional de l’étape », Jean Marc Rochette avait – brillamment – permis de tester l’appétence des Grenoblois pour une galerie de bande dessinée et un autre enfant du pays, Alfred, permet de transformer l’essai ( ben oui les métaphores liées au rugby sont de saison) depuis début septembre. Le succès est tel qu’il a fini de convaincre ses fondateurs de pérenniser la galerie.

Pèlerinage incontournable pour tout amateur d’art, voyage initiatique à valeur pédagogique, exploration archéologique ou scientifique, rémanence littéraire quasi permanente, « le voyage en Italie », unique et multiple constitue une référence absolue dans l’imaginaire européen. Militaires et pèlerins, artistes et diplomates, écrivains et riches oisifs, tous ont contribué à édifier le mythe et après Stendhal, Lamartine, Proust ou Julien Gracq, Alfred nous convie via les planches de sa trilogie italienne (« Come prima », « Senso » et depuis le 11 octobre « Maltempo ») dans son Italie à lui. Une Italie intime puisque ses parents sont des artistes d’origine italienne, qu’il y a grandi et qu’il a également choisi également de s’y installer quand il venait de devenir père.

Il y a 15 ans je me suis installé à Venise au moment ma fille est née. Je voulais à tout prix qu’elle grandisse en Italie parce que moi j’ai grandi en Italie; pour moitié je suis originaire d’un coin de Ligurie. Je ne me suis pas installé là où j’avais grandi. Elle avait deux mois quand on est parti. On s’est installé 4 ans à Venise un peu par hasard. L’appartement qu’on avait donnait juste là; il y avait un petit canal qui passait juste derrière notre appartement avec non pas un pommier mais un figuier qui dépassait et peut être dans les 2 ou 3 premiers jours après notre installation je vois quelqu’un passer, attraper la figue en bateau, et la manger.

C’est l’une des premières images un peu fortes, du coup, que j’ai de de cette ville. Je ne l’ai pas dessinée tout de suite ; je l’ai noté dans un carnet et en fait c’est l’un premier dessin que j’ai fait lorsque nous avons quitté Venise et que nous sommes revenus en France 4 ans plus tard. Le premier dessin que j’ai fait pour revenir un peu dans cette ambiance-là, c’était celui-ci.

Une Italie doublement liée à l’enfance, donc ; une Italie célébrée dans sa culture et ses beautés dans une libraire également liée aux jeunes années d’Alfred comme il nous le confiera en interview .

Une exposition à la fois solaire et nostalgique (mais la nostalgie n’est-ce pas le rêve du retour au pays ?) sur les pas d’Alfred.

Elle ne présente pas moins de 90 œuvres sur 3 salles :

  • couvertures inédites (réalisées à l’occasion des éditions Momie de ces romans graphiques
  • planches originales de la trilogie d’Alfred
  • de nombreuses illustrations en divers format et quelques exemplaires des carnets qu’Alfred appelle ses « vide-têtes » ainsi qu’un grand triptyque composé « d’instantanés » au feutre format pola intitulé « Cinque Terre »

Cette œuvre a été réalisée il y a un peu plus de 10 ans quand Alfred était en train de reconvoquer toute une série de souvenirs liés à son enfance dans un petit coin d’Italie, berceau familial, du côté des Cinque Terre.

Il a eu envie de redessiner avec des feutres d’enfant certains fragments de souvenirs comme s’il avait 5 ou 6 ans, comme s’il avait donné à l’enfant qu’il était un appareil polaroid ou des feutres. Au départ, il y a une petite photo datée de 1978 où Alfred apprend à nager avec son grand père. Il a commencé par une petite illustration 8X8 poru une exposition en 2014 sans l’idée d’en faire une série mais deux puis cinq puis dix images ont surgi du passé et en 24h il a dessiné plus de 150 fragments !

Nombre des œuvres présentées portent la mention « seulement pour l’exposition » car l’artiste nous dévoile pour la première fois une partie de ses œuvres « intimes » qu’il conserve précieusement.

Elle nous fait également plonger dans la bibliothèque idéale d’Alfred : on peut feuilleter les livres qu’il a aimés, qui l’ont inspiré et qui l’ont accompagné durant ses 30 ans de carrière. Les coulisses de la « méthode Alfred » sont aussi révélées grâce à des panneaux explicatifs sur la genèse de ses œuvres et son choix de matériel.

On y trouve aussi des estampes en tirage limité en partenariat avec la maison « les courts tirages » , des pins, des tote-bags, et autres cartes postales.

Elle est surtout accompagnée d’un ouvrage numéroté à 500 exemplaires qui la reprend et la prolonge tout à la fois, intitulé « IMPROVVISAMENTE », un recueil de 120 illustrations sélectionnées par Alfred.

Bref même si vous n’êtes pas Crésus vous pourrez repartir avec un joli souvenir (ou en faire l’acquisition sur le site). Cela avait déjà été le cas avec les « goodies » Rochette car c’était en effet dès le départ la volonté des fondateurs, Cric et Pat, de ne pas créer une galerie « élitiste »

« Un recueil de dessins issus de mes carnets. Des images qui viennent à l’improviste au petit matin, surgissant par le biais de ce rituel qui m’accompagne depuis plus de quinze ans : démarrer mes journées par vingt minutes de dessin libre et improvisé[…]Depuis toutes ces années que je pratique ça, il a fallu choisir parmi des milliers de dessins et c’était un peu casse-tête. Les fragments qui composent ce petit livre ont été picorés dans une vingtaine de carnets disséminés entre 2012 et 2022 ».

C’est une expérience inédite pour Alfred que ce « faux carnet » avec du matériau qui n’était au départ nullement destiné à la publication. Si dans les carnets originaux il y a de tout : des pleines pages de dessins, des citations vues ou entendues, des bribes de conversation glanées ça et là, des listes et des textes qui parfois envahissent le carnet, ici il a souhaité pour donner davantage de cohérence et revenir à l’essence de cette pratique ne présenter que des dessins.

« Galerie Momie » – 3 rue Lafayette Grenoble

du mardi au jeudi 14h-19h

vendredi et samedi 10h-13h / 14h-19h

Texte et photos d’Anne-Laure SEVENO-GHENO

POUR ALLER PLUS LOIN

Dans les carnets d’Alfred – Olivier Ka


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