RENÉE.E AUX BOIS DORMANTS


René.e aux bois dormants

René.e aux bois dormants
Scénario : Elene Usdin
Dessin : Elene usdin
Éditeur : Sarbacane
264 pages
Prix : 32,00 €
Parution :  01 Septembre 2021
ISBN 9782377316984

Ce qu’en dit l’éditeur

René n’est à sa place nulle part. Ni dans l’appartement qu’il partage seul avec sa mère, femme absente, aux manières froides, ni avec les autres enfants de son école ; ni dans cette ville canadienne trop grande.
Hypersensible, sauvage, il est sujet aux évanouissements durant lesquels il voyage dans des mondes fantasmagoriques. Au cours de l’un d’eux, il part à la recherche de son lapin qui s’est enfui. René bascule alors dans un monde peuplé de créatures aussi terrifiantes que bienveillantes. Sorcière sensuelle et cannibale en souffrance, ogre mangeur de lumière, créatures sans mémoire ou géant au cœur simple, côtoient René, qui lui-même se métamorphose au gré des rencontres.

Il devient Renée, fleur, chatte, arbre… Et revisite les mythes fondateurs des Premières Nations, peuples autochtones canadiens. Mais, où s’arrête le rêve ?

Ce samedi 3 décembre, Elene Usdin se voyait remettre le prix Scam (Société civile des auteurs multimédia) 2022 dans la catégorie « récit dessiné » pour son album René.e aux bois dormants au SoBD. Toujours dans le cadre du SoBD, s’est tenue le jeudi 30 à la bpi une rencontre avec l’autrice animée par Sonia Déchamps.

C’est l’occasion pour nous de remettre en 0,8avant cet album qui nous a tant marquées en repostant la chronique écrite lors de sa sortie en septembre 2021.

Comment définir l’album René.e aux bois dormants d’Elene Usdin paru aux Éditions Sarbacane ? Bande dessinée ? Roman graphique ? Difficile d’enfermer dans une case, des cases cet univers onirique, cette quête d’identité traitée par le biais de la métaphore, le rêve et la poésie. Un monde, des mondes, hauts en couleurs dans lesquels personnages et paysages se métamorphosent sans cesse. Un pur chef d’œuvre graphique dans lequel couleurs éclatantes et formes se font narration.

Il rêvait d’autres mondes

« Road-trip halluciné à la croisée des mythes.

René n’est à sa place nulle part. Ni dans l’appartement qu’il partage seul avec sa mère, femme absente, aux manières froides ; ni avec les autres enfants de son école ; ni dans cette ville canadienne trop grande. Hypersensible, sauvage, il est sujet aux évanouissements durant lesquels il voyage dans des mondes fantasmagoriques. Au cours de l’un d’eux, il part à la recherche de son lapin qui s’est enfui. René bascule alors dans un monde peuplé de créatures aussi terrifiantes que bienveillantes. Sorcière sensuelle et cannibale en souffrance, ogre mangeur de lumière, créatures sans mémoire ou géant au cœur simple, côtoient René, qui lui-même se métamorphose au gré des rencontres. Il devient Renée, fleur, chatte, arbre… Et revisite les mythes fondateurs des Premières Nations, peuples autochtones canadiens. Mais, où s’arrête le rêve ? Et qui rêve, véritablement ? René, petit garçon à la recherche de son lapin ? René, homme au crépuscule de sa vie, à la recherche de ses blessures enfouies ? Ou encore Judith, sa fille, à qui René révélera la terrible histoire de son enfance volée et de sa véritable identité, par l’intermédiaire du rêve ? »

Tel est le pitch extrêmement bien fait des Éditions Sarbacane. Chaque mot y est pesé et donne les grandes lignes du récit sans trop en dévoiler.

Les métamorphoses sont la clé même du récit puisqu’elles permettent à l’enfant en passant d’un état à un autre de franchir des seuils et progresser dans son histoire. Chaque transformation va lui permettre de savoir un peu plus d’où il vient et de découvrir ses ancêtres. Et c’est par le rêve qu’on va apprendre en fait les évènements tragiques et le drame qu’a vécus René.e.

Tableaux d’une narration

Artiste protéiforme, peintre de décors de cinéma, photographe et illustratrice de presse et de livres jeunesse, Elene Usdin signe là son premier roman graphique. Projet initié il y a une vingtaine d’années, elle le ressortira de ses tiroirs en 2017 après avoir trouvé lors d’un voyage à Montréal le fil conducteur du récit : l’épisode dramatique qui a frappé la population amérindienne dans les années 60.

Cet album est le fruit d’une véritable démarche artistique. Chaque planche est par sa composition même un véritable tableau en soi. Au commencement sont les couleurs, puis elles prennent forme pour nous raconter une histoire, des histoires. Cette utilisation de la couleur va permettre au lecteur de distinguer les différents fils temporels de l’histoire. Le rêve est un véritable feu d’artifice : on en prend plein les yeux !

La réalité ou plutôt le temps présent est décliné en camaïeu de gris. Monochromes bleus et rouges liés aux souvenirs ou flash-backs ponctuent le récit. Mais tout n’est pas si simple. Où et quand s’arrête le rêve ? Les frontières entre rêve, souvenir enfoui, et réalité sont poreuses. Priorité est donnée à l’image. Les dialogues, la voix off n’ont été posés à la main que lors de l’ultime étape, une fois le découpage achevé.

René.e aux bois dormants

Quel magnifique titre évocateur à la fois du conte et du rêve ! Le fil narratif a été construit à partir des propres rêves de l’autrice qui depuis très longtemps a pris l’habitude d’en garder une trace et en possède des carnets entiers. Ajoutons à cela l’univers des contes et des mythes du monde entier qu’elle connaît bien puisqu’elle a illustré entre autres de nombreux ouvrages de la collection Histoires noires de la mythologie (Nathan) et Mon tour du monde en 80 contes (Lito). Alors, mixant rêves et mythes, l’autrice donnera naissance à cet univers original, un univers animiste dans lequel, aux côtés de l’enfant au pyjama couleur de ciel guidé par Véhicule, le Deux-esprits dont le nom vient de la Mythologie tibétaine, on croisera les esprits de la forêt chers à Miyazaki, le Mangeur de lumière qui semble tiré tout droit de l’univers de Francis Bacon … jusqu’à la rencontre avec Isba, femme-oiseau bleue cracheuse de corbeaux descendante des Wendigos qui réalise les vœux des gens qui viennent la consulter.

L’album est truffé de références littéraires, picturales, cinématographiques. Pour n’en citer qu’une, la plus évidente, bien sûr est le clin d’œil à Lewis Caroll. Outre le fait que René part à la recherche de Sucre-doux, son lapin doudou qui connaît tous ses secrets, il va passer de l’autre côté du miroir, non pas par le terrier du lapin mais par le carton du frigo ou les cartons de cette ville froide dans laquelle il vit et qui va se teinter d’ expressionnisme dans ses rêves.

Maintenant, il ne vous reste plus qu’à ouvrir ce splendide album de près de 280 pages et je suis convaincue qu’envoûté.e par la beauté des planches, vous allez vous y plonger, vous laisser dériver au fil des rêves et en ressortir groggy, n’ayant qu’une envie, tout reprendre au début. Une rené.essence !

POUR ALLER PLUS LOIN

Cliquez sur le lien pour accéder à son site :

Elene Usdin

Trois études de figures au pied d’une crucifixion

Francis Bacon, 1944

Chronique de Francine VANHEE

Prix Scam

2022

du récit dessiné

La rencontre à la bpi le jeudi 1er décembre

La genèse de l’album

Lors de la rencontre animée par Sonia Déchamps, Elene Usdin, est revenue sur la genèse de l’album :

« Ça a pris la forme de personnages d’abord. J’avais les personnages en tête qui me venaient vraiment des rêves. Donc je transcrivais ces personnages, je leur inventais des histoires. Je suis arrivée à une galerie assez conséquente qui a donné naissance finalement aux personnages qui existent aujourd’hui dans cette bande dessinée. À ce moment-là, j’avais déjà l’idée assez précise d’un homme, un homme mûr qui décide de mettre fin à ses jours. On va le suivre dans son coma et son coma en fait, ça va être ses rêves à l’âge de lui enfant. Finalement c’est son fils (à l’époque c’était son fils) qui venait pour le faire soigner… J’avais envie de raconter une histoire comme ça. C’était aussi le prétexte de raconter des histoires dans une histoire dans ma bd. Sauf que je ne savais pas pourquoi cet homme voulait se suicider, je ne savais pas quel était le drame de cette personne. Alors, j’ai mis tout ça dans un tiroir. »

En 2017, donc 17 ans plus tard, alors qu’elle se trouve au Canada, éclate le scandale de l’arrachement à leur famille entre 1960 à 1980 de milliers enfants autochtones et métis pour les faire adopter par des familles blanches. Le drame personnel de René va rejoindre l’histoire du Canada. Elene va pouvoir ressortir ses carnets…

Quelques sources d’inspiration

La dessinatrice nous a fait également fait part de part de ses inspirations : Taniguchi pour sa relation au temps, Miyazaki pour les liens avec la nature, Bonnard, Vuillard, David Hockney, Peter Doig et les peintres canadiens du groupe des 7 (qui ont peint les grands espaces canadiens en s’attachant à la lumière, aux représentations de l’eau) sans oublier Mattoti pour la couleur.

Les peintres du Groupe des sept au Arts and Letters Club de Toronto, en 1945.

Son projet en cours

Enfin, elle nous a parlé de son projet en cours, projet à 4 mains cette fois avec son fils Joseph. Il y est encore question de quête d’identité, non plus au Canada mais aux États-Unis cette fois, à Détroit.

[Il s’agit de] « 2 jeunes filles qui ont chacune un attachement à leur famille très particulier. Ça se passe à Détroit. Leurs racines sont rattachées, pour l’une afro-américaine à l’esclavagisme et pour l’autre à la culture italienne. Tout ça pour parler de l’importance de nos racines, de l’attachement à nos racines, de l’importance de l’identité. Qu’est-ce qu’on fait de ça? Qu’est-ce qu’on fait de nos parents ?« 

Elene Usine voulait que ça se passe à Détroit et qu’il soit question du lien des générations nouvelle avec l’histoire de leurs parents. Joseph a vécu à LA un temps et elle à Détroit.

« On est venus chacun avec des personnages dont on avait envie de raconter l’histoire et finalement le démarrage de notre collaboration, ça a été de créer un ciment entre tous ces personnages. ca met en place une histoire assez bizarre née d’une rencontre entre Joseph avec ses 24 ans et moi avec mes 51 ans.« 

Une grande partie de l’histoire est racontée dans les carnets de l’une des jeunes filles. Un des personnage est paranoïaque. On va donc suivre se qui se passe dans sa tête, et comme dans les films de David Lynch, par moments « on perd pied en on ne sait plus à quel moment on est dans la réalité »…

L’interview au festival d’Angoulême

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