VISAGES T.1


Visages
T.1 Derrière les signes ennemis

Visages : Ceux que nous sommes
Derrière les signes ennemis
Scénario : Miceal Beausang-O’Griafa
& Nathalie Ponsard-Gutknecht
Dessin : Aurélien Morinière
Éditeur : Glénat
Collection 24×32
56 pages
Prix : 14,95 €
Parution :  11 janvier 2023
ISBN 9782344022924

Ce qu’en dit l’éditeur

L’Histoire est le visage de l’aventure humaine.

1914. Louis Kerbraz, jeune Breton passionné, part défendre la France. Au même moment, une jeune allemande téméraire, Lieselotte Ruf, arrive sur le front adverse. Cette photographe s’est engagée comme infirmière dans la Croix-Rouge. Rien ne prédisposait Louis l’immortel et Lieselotte, l’Ange des tranchées, à se rencontrer. Pourtant, faisant fi du conflit qui oppose leurs nations, ces deux âmes artistiques vont s’aimer et, de cet amour naîtra un garçon. Dans le chaos qu’engendre la fin de la guerre, les deux amants se perdent. L’« enfant de la honte » qu’ils ont conçu sera retiré des bras de sa mère, et le jeune orphelin, blessé par la haine qu’on lui voue dans son propre pays, va en concevoir un extrême ressentiment envers ses deux géniteurs… Ainsi naîtra la saga tourmentée d’une famille déchirée sur trois générations.


Sur un fond historique authentique, de 1900 à 1954, suivez la destinée de cinq personnages, de nationalités et de générations différentes, qui vont inscrire leurs destins croisés dans des mondes en guerre. Mais qu’est-ce qui détermine au final notre identité ? Qu’est-ce qui constitue ceux que nous sommes ? Face à une Histoire qui se répète, les enfants réagiront-ils comme leurs parents ? L’union des différences n’est-elle pas préférable aux conflits et aux rancoeurs, préfigurant ainsi, en miroir, la formation de l’Europe des Nations ? Une grande saga d’aventures romanesques en quatre tomes, à paraître tous en 2023.

UNE SAGA « ROMANESQUE »

Glénat lance une nouvelle saga historique : « Visages » ! Elle se déroule de 1900 à 1954 et met en scène les destins de sept personnages principaux de générations et nationalités différentes, leurs histoires croisant la grande Histoire et deux conflits mondiaux. À l’origine de cette tétralogie qui paraîtra en totalité en 2023, on trouve un duo de scénaristes : Nathalie Ponsard Gutknecht, graphiste française mariée à un Allemand, et Miceal Beausang O’Griafa, interprète français né d’un père irlandais et d’une mère chilienne. Tous deux se sont interrogés sur l’interculturalité comme le met en avant le sous-titre « Ce que nous sommes » ainsi que le titre du célèbre tableau de Gauguin « D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? où allons-nous ? devenu une citation placée en exergue. Ce tableau monumental (frise de près de 4m de long), l’artiste pensait qu’il serait sa dernière œuvre et en a fait son testament métaphysique. Or, c’est bien le thème de l’identité qui est au cœur de ce tome introductif « Derrière les signes ennemis » admirablement mis en scène par Aurélien Morinière.  

1927. Un orphelinat catholique du Sud de l’Allemagne. Le petit Georg Knielingen est bien seul. Personne ne lui adresse la parole, pas même les sœurs. Blessé par cette incompréhensible hostilité, il s’introduit, de nuit, par effraction, dans les bureaux de l’institution afin de consulter les documents le concernant. Il découvre alors qu’il est le fruit des amours d’un soldat français, Louis Kerbraz, et d’une jeune infirmière-photographe allemande Lieselotte Ruf. C’est un « enfant de la honte », un « bâtard » comme le lui a asséné l’une des religieuses ! Il s’empare d’un médaillon renfermant un portrait de ses parents qui se trouvait dans son dossier bien déterminé à les retrouver et à leur faire payer son abandon…

UNE TRAGÉDIE

Si l’histoire commence in media res avec Georg, c’est davantage de ses parents dont il va être question dans ce volume d’ouverture qui, comme un opéra, met en place les différents thèmes qui seront filés tout au long des 4 actes que constituent les tomes. On va ainsi découvrir comment les deux protagonistes se sont rencontrés et quelle fut leur histoire d’amour. Le titre de l’album le souligne d’ailleurs : leur passion est née « Derrière les signes ennemis » (et non « les lignes » comme on aurait pu s’y attendre) c’est-à-dire en faisant fi des apparences et du contexte historique, à la façon d’une tragédie racinienne, « malgré lui, malgré elle », ou shakespearienne.

Comme la toile de Gauguin, sous le patronage duquel se place la série, mêle les différents âges de la vie, les scénaristes ne choisissent pas d’effectuer une relation linéaire des destins des personnages. Nous commençons en 1927, poursuivons en 1940, pour revenir en 1914 et aller jusqu’en 1918 mais nous ne sommes jamais perdus en chemin. Nous assistons à l’épanouissement d’une part de l’histoire d’amour et d’autre part de la rancœur de Georg : les deux se tressant en contrepoint pour atteindre un crescendo dans les pages finales de l’ouvrage.

UN DESSIN SYMBOLISTE ET EXPRESSIONNISTE

Donc, même s’il s’agit d’un tome introductif, on y trouve un suspense habilement mené et une mise en place dynamique des arcs narratifs. L’ensemble est vraiment mis en valeur par le dessin magnifique d’Aurélien Morinière qui commença par travailler dans l’animation avant de se tourner vers la peinture et la bande dessinée . On retrouve dans l’album  les multiples facettes de cet artiste qui se consacre entièrement à cette série depuis trois ans. Il nous offre en effet une variété de pages époustouflantes en alternant gaufrier classique, grandes cases de soldats à l’assaut en 1914, pleines pages de soldats marchant dans la forêt des Ardennes en 1940,

doubles pages à la savante construction en miroir pour évoquer les destins des deux amants (que le format et la « pliure » de l’album cassent un peu, hélas) en 1917… Ses décors sont tout autant travaillés que les expressions de ses personnages et il parvient à faire ressentir au lecteur toute la force des sentiments extrêmes qui animent les protagonistes. Les scènes de combats sont également splendides et dynamiques.

Son style se fait tantôt symboliste tantôt expressionniste. Il joue savamment de la lumière et surtout des ombres. On perçoit dans ses hachures et ses tons de glaise et de boue toutes les horreurs des tranchées à la manière d’un Otto Dix.

Nathalie Ponsard-Gutknecht et Miceal Beausang-O’Griafa se sont livrés à un minutieux travail de documentation pendant les huit années qu’ils ont porté ce projet et nous en donnent un aperçu dans le fort bienvenu cahier historique qui clôt l’ouvrage. Ils nous proposent en effet en annexe des articles qui permettent de replacer leurs histoires dans l’Histoire et leur donnent toutes leurs dimensions. On en apprend ainsi davantage par exemple sur la bataille du Hartmannswillerkopf, sur le droit de vote des femmes et la révolution de 18 en Allemagne ou encore sur l’artisanat des tranchées qui revêt un rôle capital dans cet album et dont on entend généralement peu parler.

On pourra se sentir frustré par le format que d’aucuns jugeront trop court pour une fresque épique (48p) d’autant qu’on s’habitue à lire désormais de gros one shots. Mais l’on se consolera en se disant qu’on ne tardera pas à retrouver ces personnages dans le 2e volet qui sort fin avril. « La pratique Andromaque » se déroule en grande partie durant les années folles. On y suivra Louis dans sa carrière de peintre puis de metteur en scène parisien ainsi que l’ascension de Lieselotte comme l’une des premières femmes reporter au sein d’une prestigieuse rédaction berlinoise. Le tout sur fond de montée du Nazisme …

POUR ALLER PLUS LOIN

Exposition consacrée à la série au Goethe Institut de Paris prolongée jusqu’au 11 avril 2023

( et bientôt dans les autres Goethe instituts de province).


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